Quantcast
Channel: miam » Arpège
Viewing all articles
Browse latest Browse all 2

L’Arpège – juin 2011

$
0
0

Toutes les photos ici

J’ai eu 30 ans cette année. Ca change quoi ? Absolument rien. Mais un anniversaire, c’est l’excuse parfaite pour se payer un bon restau. Et comme je ne reviens à Paris qu’assez rarement, et que par rapport à la Suisse, même les établissements les plus réputés semblent presque bon marché, c’est sans remord que j’ai décidé de retourner à l’Arpège.
J’étais en vacances, y aller pour déjeuner semblait donc être l’option idéale. Certes à 115 EUR le menu, essentiellement axé sur les légumes, ça reste un luxe indécent, mais relativement plus raisonnable qu’au dîner.

Cette seconde visite a confirmé l’enthousiasme suscité par ma première visite du restaurant, deux ans plus tôt, presque jour pour jour.

Déjà, ce que j’apprécie à l’Arpège, c’est le côté quasi bohème de ce trois étoiles à l’ambiance décidément plus détendue qu’ailleurs. Ici, les tables ne font pas 50m², les fauteuils ne semblent pas sortir d’un musée, et on ne s’enfonce pas dans la moquette comme dans des sables mouvants. Même la vaisselle joue la carte de l’élégance très sobre : blanche, marquée d’un liseré marron, sorte de mise en abyme de la cuisine de Passard, subtile, minimaliste, traçant le plus court chemin entre la terre du jardin et les papilles du client.

Evidemment, ce concept parfaitement dans l’air du temps a ses limites. Un produit bon plutôt qu’excellent, une préparation juste mais sans génie, et on se retrouve devant une assiette objectivement appréciable mais sans grande émotion. C’est un peu ce que j’ai ressenti cette fois ci avec un plat de tomates, cerises et oignon. Tout y était très bon, et d’autant plus satisfaisant les tomates de qualité ne courent pas les rues. Ce qui est en revanche plus exceptionnel, c’est que je me rappelle de ce plat comme « celui qui était bon mais sans être fantastique ».


Car tout le reste fut proprement excellent. Les tartelettes légumières, toujours aussi fraîches et appétissantes (au sens propre du terme), l’oeuf, à peine cuit, au jaune coulant, dont j’ai préféré la préparation estivale, plus incisive que la déclinaison dégustée deux ans plus tôt. Autre tour de force, très osé : le mesclun de salade, agrémenté d’un petit praliné de noisette qui nous fait définitivement prendre conscience du niveau stratosphérique du restaurant.

Mais réduire l’Arpège aux plats de légumes serait bien dommage. Le homard au vin jaune, de nouveau dégusté est un incontournable. Là encore, rien de trop : un homard à la cuisson très juste, lui conférant une chair douce et nacrée, parfaitement tendre, sans la moindre sensation caoutchouteuse, une sauce au vin jaune s’accordant magnifiquement avec le crustacé mais également avec les pommes de terre fumées au bois de hêtre. Pour vivifier et parachever le tout, une feuille de chou croquant. C’est tout, et on imagine difficilement comment ça pourrait être meilleur.

La poularde, préparée à l’étouffée dans la paille est également un exemple de belle cuisine. Viande savoureuse, juteuse, peau craquante, jus intense… on avait failli oublier que c’était possible.

.

Les desserts sont rarement présentés comme le point fort du restaurant. Pourtant, difficile d’être moins qu’élogieux devant les délices qui nous ont été proposés. Peut être pas aussi inattendu et renversant que la glace à l’absinthe de la visite précédente, le sorbet aux fruits rouges et à l’hibiscus était un modèle du genre. Un concentré d’été, acide comme il faut. Le mille-feuille, également aux fruits rouges, dont les serveurs promènent le feuilletage éthéré certes très « m’as-tu-vu » n’a pas déçu non plus. Car, justement, cette légèreté encore un peu renforcée par la fraîcheur de la crème menthe et mélisse fait de la pâte un véhicule pour les fruits plutôt que l’inverse. Bref, ici, on a gardé à l’esprit le cruel rôle joué par la pâtisserie en restaurant, venant conclure un repas déjà bien chargé en goûts et calories (voire en alcool…), et qui doit donc prolonger le plaisir, continuer de susciter la curiosité avec le peu de satiété et d’attention qui restent chez les convives.

Et du coup, je m’attendais à ne guère être réceptif à la tarte aux pommes « bouquet de rose », qui m’avait déçu la fois précédente. Ce fut finalement tout le contraire qui se produit. Fine pâte feuilletée, tranches de pommes roulées en cylindres déposés verticalement, sauce de caramel au beurre salé… un peu de croquant a été ajouté avec les amandes grillées. Et c’était excellent. La construction de la tarte permet d’avoir le caramélisé de la pomme sur le dessus, tout en conservant du fondant, de la fraîcheur du fruit sur le dessous.

Autre excellente nouvelle : alors qu’en 2008 la carte des vins affichait des coefficients énormes (x4 ou x5 sur les bouteilles que je connaissais), les prix sont aujourd’hui plus doux (x1.5, x2), surtout pour un restaurant de ce calibre. A l’occasion de ce repas, j’ai – enfin ! – eu l’occasion de découvrir le champagne de Selosse, avec son brut Initial. Un vin faramineux, complexe, subtil, aux accents oxydatifs. A se demander pourquoi on voudrait faire du champagne autrement…

Je ressors de ce repas avec une question angoissante : si, finalement, certaines choses furent mieux cette fois-ci que la précédente, est-ce que je ne suis pas en droit d’imaginer que, peut-être, ça pourrait encore aller plus loin dans l’excellence ? J’y crois assez fort. Pour s’en assurer il faudrait y retourner une dizaine de fois. Je ne suis pas sûr que mon banquier et employeur soit d’accord. Et finalement, c’est bien mieux comme ça, car s’habituer à l’exceptionnel, c’est aussi en retirer moins de plaisir à chaque fois (c’est du moins ce que je me dis régulièrement pour m’empêcher d’acheter des billets d’avion pour le Japon).


Viewing all articles
Browse latest Browse all 2

Latest Images

Trending Articles





Latest Images